Shéhérazade
Le mystère des carnets volés (extrait)
Une place, quelques étals couverts d’une toile blanche, au fond, des maisons basses aux murs blancs et un minaret en carton-pâte. De jeunes filles aux pieds nus dansaient au son d’une musique lancinante. De jeunes gens au visage farouche les regardaient. Sonneries de trompette, coups de cymbales. Un homme entra sur scène. Il portait une barbe fournie, un turban blanc, une tunique verte et un yatagan. La musique était devenue martiale. Tout le monde se prosternait devant lui. Soudain, la lumière se fit plus tamisée. Un halo orangé éclaira l’arrière de la scène. Une jeune femme descendit lentement des cintres. Elle était assise sur un croissant de lune. Cette fois, l’orchestre joua « lento », égrenant des notes suaves. Salomé-Shéhérazade prit pied sur la scène et s’avança vers le sultan. Elle avait une démarche altière. Elle était couverte de voiles qui laissaient voir, par transparence, l’élégante plastique de ses cuisses galbées et les jolis dômes de ses seins. Son visage aux grands yeux charbonneux et au teint mat d’Égyptienne39 dégageait un charme envoûtant.
Paul avait apporté ses jumelles de théâtre. Il ne le regrettait pas. Il ne pouvait détacher les yeux du corps sublime de la jeune femme. Autour de lui, toutes les jumelles étaient braquées vers elle. Le directeur du théâtre, prévoyant, en vendait à l’entrée. Ce ne fut qu’au deuxième tableau, que Paul, passablement perturbé, s’aperçut qu’en plus des brillants qui ornaient ses voiles, Salomé-Shéhérazade portait un collier, un diadème, un bracelet et des boucles d’oreille ornés de pierres précieuses multicolores. Il était grand temps qu’il se reprenne ! Cela dit, il ne pouvait rien faire avant la fin du spectacle, alors autant en profiter.