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Belle Époque

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Concert à Gaveau

20 Novembre 2023, 10:00am

Il n'y a pas de photos du concert de soutien aux hôpitaux de la SSBM. Cette photo de 1913 appartient à la BNF, licence Creative Commons Universal Public Domain

Ça, pour être une belle soirée, c’est une belle soirée ! Tenez, là-bas, c’est Madame Sainte-Marie. C'est elle qui a organisé ce gala. Vous pouvez me prêter vos jumelles ? Le vieil homme à sa gauche doit être le père d'Armande Panetier. Il n'est pas en habit. On ne l'aurait jamais laissé entrer si ce n’était pas lui. Le soldat à droite ? Je ne sais pas. Je ne le connais pas. Mais vous savez, c'est à la mode de se montrer avec un soldat. Entre nous, celui-là n'a certainement jamais été au front. (Rire.) Je dirais que c'est un ami de la famille qui fait son service comme planton dans un ministère. (Nouveau rire.) Je ne lui jette pas la pierre ! Je ferais la même chose à sa place. Ça ne retire rien au mérite d'avoir organisé ce gala. Vous savez que toute la recette ira à la Croix-Rouge ? Même les ouvreuses ont accepté de ne pas être payées. Remarquez, le docteur Sainte-Marie dirige un hôpital de la SSBM. Comme on dit, charité bien ordonnée... Espérons qu'il en laissera un peu pour les autres. (Rire.) L'homme avec un binocle à côté de Viviani ? C'est Delcassé. Le ministre des Affaires étrangères. Et Briand, vous l'avez vu ? Deux rangs derrière. Du côté gauche. On dit qu'il va remplacer Viviani. Oh, regardez ! Sarah Bernhardt vient d'arriver. Si, si... Au milieu du groupe qui s'est levé... Là, vous la voyez, maintenant ? Et la dame un peu forte, vous la reconnaissez ? C'est Louise-Amélie de Montfort. La nièce de la duchesse de Roquevieille. Elle ne sort plus, la duchesse de Roquevieille. Elle va sur ses quatre-vingts ans. Si, si... En tout cas, elle en a plus de soixante-quinze. Ah ! Voilà Madame de Chantenay. Avec sa fille, Madame de Courtrai Privat. Son mari est à l'État-major. Enfin, son mari (gloussement) sur le papier ! On dit qu'il la trompe depuis le premier jour...

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Sur les traces de Pierre et du 73e RI

17 Novembre 2023, 10:00am

Un peu d'histoire sur les traces de Pierre et du 73e RI...

Août 1914. La bataille des frontières s’inscrit dans le plan d’offensive à outrance de l’état-major français. Elle conduit une partie des troupes françaises à pénétrer en Belgique. Elles se heurtent aux troupes allemandes plus nombreuses qui ne tardent pas à les déborder. C’est le début de la Grande Retraite…

La bataille de Guise, appelée également bataille de Saint Quentin (29 août 1914), est une tentative d’arrêter la progression de l’armée allemande après l’échec de la bataille des frontières. La bataille de Guise se solde par un demi-échec. La progression allemande n’est pas stoppée mais elle est ralentie, ce qui permet aux troupes allée de se replier en ordre sur une ligne qui suit la Marne.

En septembre 1914, le château d’Esternay (département de la Marne) est occupé par les soldats Allemands du IXe corps. Il est repris par les soldats du 43e et du 73e régiments d’infanterie le 7 septembre après un combat très meurtrier.

Le secteur de Pontavert (département de l’Aisne) est très disputé au cours de l’automne 1914. Le 12 octobre débute une série d’offensives et de contre-offensives qui vont se poursuivre pendant deux mois et auxquelles on a donné le nom de bataille de la Ville-au-Bois. C’est au cours de cette bataille que Pierre a été décoré de la Médaille Militaire.

La zone du bois d’Ailly se situe entre les communes de Saint Saint-Mihiel et de Marbotte dans le département de la Meuse. Elle a été le théâtre de combats acharnés en avril-mai 1915. Un mémorial a été érigé à Marbotte. La "Tranchée de la Soif", qu’il est encore possible de visiter, témoigne des souffrances endurées par les hommes, coupés de tout ravitaillement, au cours de ces combats. Pierre a été grièvement blessé au cours de cette bataille et n’a dû son salut qu’à l’intervention de son camarade Raymond Guttierez…

 

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Raymond

16 Novembre 2023, 10:00am

Raymond regarde Pierre d’un air goguenard. Il est arrivé au régiment en début avril, Raymond. Le sergent Lebrun était venu voir Pierre. Un vétéran, Pierre. Il a survécu à la bataille de Mesnil-les-Hurlus, juste à son retour de perm. Un carnage. Trois semaines de combats, deux cent cinquante morts, plus de six cents blessés, rien que pour le 73e régiment. Donc Lebrun était venu le voir. Il faudra avoir l’œil sur cet oiseau-là. Faut dire qu’il a la médaille militaire, Pierre Panetier. Alors on lui fait confiance. S’il voulait, il passerait caporal. Raymond, c’est un type plutôt jovial. Trapu, cheveux bruns, des yeux qui hésitent entre le bleu et le gris. C’est selon la météo. Un nez tordu. Boxe ou rixe ? Il t’a dit quoi, le sergent à mon sujet ? Que t’étais un drôle d’oiseau. Raymond avait rigolé. T’as vu mon poids, je risque pas de m’envoler ! Faut dire qu’il est un peu enveloppé.

- Qu’est-ce que t’as fait pour être classé dans la catégorie des oiseaux ?

- Je sors de taule.

Deuxième classe Raymond Guttierez, 73e RI

Pierre avait hoché la tête. Raymond avait levé le doigt :

- Attention, j’ai tué personne. Mon seul péché est d’avoir emprunté de l’argent à des richards et de ne pas leur avoir rendu.

Pierre sourit. Escroc ?

- Tu les as plumés en quelque sorte. Un oiseau qui plume ses victimes, c’est pas banal.

Raymond était parti d’un grand éclat de rire.

- Note bien qu’ils n’en avaient même pas besoin, de l’argent que je leur ai emprunté. Ils en avaient encore largement assez pour mener la grande vie. Ils m’ont cherché des noises parce que je n’étais pas de leur monde. Quand ils se volent entre eux, ils ne font pas tout ce ramdam.

- Bienvenue au 73e régiment. Tu vas regretter de ne pas être resté en prison.

Il ne croyait pas si bien dire, Pierre. Quelques jours après, ça a pété au Bois de Darmont. Soixante-dix morts, plus de deux cent cinquante blessés. Et il lui devait une fière chandelle, Raymond. On était couché par terre, entre les lignes. Ça canardait de partout. Le gars à sa gauche s’est relevé pour se replier et Raymond s’apprêtait à le suivre. Pierre l’a attrapé par la cheville, il s’est aplati en jurant. Une rafale de mitrailleuse a coupé en deux l’autre gaillard. Un grand type qui jouait de l’harmonica et qui racontait des blagues salaces. Raymond a regardé Pierre. Il était tout pale. Je te revaudrai ça, mon pote.

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Expédition des Dardanelles

15 Novembre 2023, 10:00am

Un peu d'histoire...

Lors de la première guerre mondiale, l’Empire Ottoman a pris parti pour la Triplice. L’Empire Ottoman contrôle le détroit des Dardanelles, la route maritime entre la Russie et ses alliés français et anglais est donc coupée. En 1915, les alliés décidèrent d’occuper la péninsule de Gallipoli au nord du détroit pour rouvrir la voie maritime.

Les opérations débutèrent le 25 avril 1915. Le contingent français compte 75000 hommes sous les ordres du général Louis Franchet d’Espérey, parmi lesquels ceux du 175e RI et du 1er RMA qui débarquèrent le 27 avril et le 28 avril dans la baie de Morto. Le débarquement se déroule dans de bonnes conditions et les deux régiments atteignent rapidement le ravin du Kéréves Déré.

Le 5 mai, les alliés lancent une offensive pour prendre la ville de Krithia. Malgré de multiples assauts et trois mois de combats acharnés, la bataille se solde par un cuisant échec de nombreuses pertes humaines (le 175e RI perd 650 hommes).

Évacuation des troupes après l'échec de l'expédition

L’État-major allié prend acte de cette défaite et décide l’évacuation de la péninsule. Le 175e RI débarque ensuite à Salonique pour attaquer l’Empire Austro-hongrois sur son flanc sud, en Serbie. Il sera notamment engagé dans la bataille de Monastir entre septembre et novembre 1916.

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Odette s'inquiète

14 Novembre 2023, 10:00am

Fallait-il que tout au long de sa vie elle soit rongée par l'inquiétude ? Que chaque nuit elle se réveille angoissée, incertaine du lendemain ? Que chaque fois qu'elle pense avoir trouvé, sinon le bonheur, du moins la sérénité, tout soit remis en question ?

Elle est injuste, Odette. Depuis 1902, depuis cette année de cauchemar au cours de laquelle elle a cru perdre pied définitivement, elle est plutôt gâtée. Elle est mariée à un homme qui l'aime. Elle a trois enfants qui lui procurent beaucoup de satisfaction. Elle se rend utile auprès de femmes qui n'ont pas autant de chance qu'elle... En un mot, elle est heureuse.

Elle était heureuse. Aujourd'hui, il y a cette guerre qu'on annonçait courte et qui s’éternise. Et qui sait combien de temps elle va encore durer !

Elle n'est pas dans le besoin, Odette. Alexandre gagnait bien sa vie comme chirurgien à l'hôpital et elle a de quoi voir venir. Il y a tant de femmes qui se sont retrouvées sans ressources ! Qui travaillent pour 8 sous de l'heure douze à quatorze heures par jour et six jours par semaine dans les usines d'armement. Mais Alexandre est parti. Il opère dans un hôpital de campagne, quelque part dans l’Est. Comment ne pas être inquiète ? Les quelques personnes qui sont revenues du front disent qu'il y a des bombardements tous les jours !

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Lettre à Marguerite

13 Novembre 2023, 10:00am

Bonus

Ma petite Marguerite…

Il a plu dans la nuit et l’eau continue de s’égoutter de la toile qui couvre en partie la tranchée. Ce matin, les nuages laissent voir par endroits des lambeaux de ciel bleu. Robert discute avec Étienne et Hyacinthe en roulant une cigarette. Le front est calme de ce côté ces jours-ci. Le canon tonne du côté de Commercy. Ça doit barder, là-bas. Un monoplan traverse lentement le ciel en bourdonnant. Il porte une croix noire sur fond blanc. On tend le poing vers lui. Salaud de Boche.

Ma petite Marguerite…

Pierre s’est installé un peu plus loin et mâchonne le bout de son crayon. Pierre a fermé les yeux. Se souvenir des moments passés avec Marguerite, quand elle venait le rejoindre à l'atelier le samedi après-midi... Des souvenirs qui n'ont pas la légèreté ni l'insouciance des moments passés avec Zélie. Ni la mystérieuse profondeur de la rencontre avec Héloïse. Une certaine gravité. Oui, une certaine gravité.

Bruits de dispute. Ça se termine toujours par une dispute les parties de cartes avec Hyacinthe.

Ma petite petite fleur...

Ça sonne faux. Il n'y a jamais eu beaucoup de tendresse dans sa relation avec Marguerite. Beaucoup de pudeur et de retenue, oui, mais peu de tendresse hormis après l'amour. La même pudeur et la même retenue que celles que manifestait son père à sa maman. Et pourtant la relation entre ses parents était profonde. Vingt après, son père continuait de fleurir la tombe de Philippine.

Il avait imaginé que l'éloignement, l'absence lui permettrait de ressentir pleinement so  attachement pour Marguerite. Un sentiment si facilement affadi par la routine. Il n'en était rien...

Mais aujourd'hui il y a l'enfant qui va naître. Cela lui donne des responsabilités. On l'appellera Louis si c'est un garçon, Louise si c'est une fille. Peut-être que leur couple se construira autour de cette naissance ? Peut-être cela a-t-il été le cas pour ses parents ?

Un bruit terrible. La terre tremble. Ça vous comprime le cœur. Le sergent sort, hébété, de l'abri. Bon sang, et s'il allait mourir ? Sans voir son enfant ? Pierre est pris d'une soudaine angoisse. Que peut-il faire ? Il regarde la feuille blanche sur la planchette. À quoi bon les mots ? Marguerite et l'enfant pas encore né et déjà orphelin. Coup de sifflet.

- Onzième compagnie, à vos postes de combat !

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Madeleine

10 Novembre 2023, 10:00am

En 1903, [Madeleine] avait commencé comme apprentie avec Juliette. À elles deux, elles en abattaient du travail ! Juliette faisait les patrons, Madeleine coupait le tissu, montait les robes, faisait les coutures. Pas si vite, Madeleine ! J’ai à peine le temps de dessiner une nouvelle robe que tu as déjà terminé la précédente. Madeleine sourit en pensant à cette période. Elle mettait un point d’honneur à travailler vite et bien. Elle voulait montrer à Juliette qu’elle était digne de sa confiance. Au bout d’un an, elles avaient pris une apprentie, puis deux… En 1910, elles avaient un petit atelier. Elles avaient… parce que Juliette présentait toujours Madeleine comme son associée. Et d’ailleurs Juliette lui avait passé la main deux ans après. Elle ne voyait plus très clair, la pauvre.

Madeleine

Quand la guerre avait commencé, Madeleine n’avait pas attendu passivement la suite des événements. Elle avait très vite compris qu’elle ne pourrait pas faire tourner son atelier en ne fabriquant que des robes à façon. L’armée avait besoin d’uniformes, les hôpitaux de blouses, de vêtements pour les blessés… C’est à ce moment que l’intervention de Monsieur Wenger avait été décisive. Allez donc convaincre un fonctionnaire de passer commande à une jeune Annamite et à un banquier de lui faire crédit ! Elle avait loué un nouveau local, acheté des machines, embauché des filles. Cinq francs par jour pour douze heures de travail, six jours sur sept. Les femmes de soldat touchaient une allocation d’un franc et cinq sous par jour et dix sous par enfant. Madeleine savait bien que c’était peu mais les prix étaient tirés vers le bas. Difficile de donner plus. Il lui restait un peu plus de deux cents francs par mois...

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Munitionnettes

9 Novembre 2023, 10:00am

Un peu d'histoire...
Lorsque les hommes sont partis au front en 1914, les moissons n'étaient pas faites. Le 7 août 1917, le Président du conseil René Viviani lance un appel aux femmes de France, et en premier lieu aux femmes d'agriculteurs, pour assurer les vendanges et les moissons. 
 
On imaginait à l'époque que la guerre serait courte. En octobre 17, il faut se rendre à l'évidence. La guerre va durer. Se pose alors la question du remplacement du personnel masculin des usines d’armement. On fait alors appel aux munitionnettes.

 

Une munitionnette est une femme qui travaille dans une usine d’armement. Au début de la guerre, elles ne représentent que 6 ou 7% de l'effectif dans ces usines. En 1917, elles seront plus de quatre cent mille. En quatre ans, on évalué à  trois cents millions le nombre d'obus fabriqués par les munitionnettes et à six milliards le nombre de cartouches !

Les conditions de travail sont pénibles. La réglementation du travail a été suspendue pour permettre l'effort de guerre. La journée de travail peut aller jusqu'à 14 heures. Les femmes sont debout, elles manipulent des obus de 7 kilos et en voient passer 2500 par jour entre leurs mains. Et, bien sûr, elles sont sont exposées à des produits dangereux. Leur salaire est inférieur à celui des hommes. 50% en 1914. L'écart se réduit par la suite mais il reste significatif.
A la fin de la guerre, les femmes sont renvoyées chez elle et retrouvent leur position subordonnée...

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Retraite

8 Novembre 2023, 10:00am

Morne défilé. Fantassins, capote bleue, pantalon garance et képi bleu ; chasseurs à pied, capote et pantalon bleus ; artilleurs montés sur les chevaux de leurs lourds attelages ; cuirassés, tunique bleue, pantalon garance, casque cabossé et bottes crottées ; chasseurs à cheval, tunique bleu horizon, pantalon garance et képi à plumet ; soldats du génie, capote bleue et pantalon bleu nuit… Ils forment une colonne interminable qui traverse les villages du nord-est de la France sous les yeux consternés et inquiets des habitants, vieillards, femmes, enfants, qui verront quelques jours plus tard, parfois même le lendemain, arriver les soldats allemands, précédés par les uhlans en uniforme vert-de-gris, avec leur longue lance et leur casque surmonté un curieux carré d’acier horizontal. Un défilé d’hommes exténués qui marchent depuis des jours. Certains se sont battus, mais est-ce se battre que de courir sous la mitraille et finalement se replier en laissant des camarades les yeux emplis de terreur agoniser sur le terrain ? D’autres pas. Ils marchent depuis des semaines, renvoyés d’un village à un autre, sans comprendre ce qu’ils font.

Plan des opérations, voir le site de JP Rissoan

La retraite. La vague bleue se retire. De Saint-Mihiel à Maubeuge, près d’un million d’hommes se replient, la troisième armée de Ruffey, la quatrième armée de Langle de Cary, la cinquième armée de Lanrezac et le corps expéditionnaire britannique de French. Sur le carnet de Pierre, des noms de village et des dates. Rien d’autre. La Neuville aux Tourneurs, 26 août. Beaumé, 27 août. Agnicourt, 28 août. Le 29, changement de direction. On remonte vers le nord-ouest, en direction de Guise, avec deux groupes d’artillerie. On entend de nouveau le son du canon. Sur la route, en sens inverse, de pauvres charrettes, tirées par des chevaux hors d’âge et guidées par des hommes d’une cinquantaine d’années, ou même des charrettes à bras, sur lesquelles on a entassé tout ce que la famille jugeait indispensable. La grand-mère est assise à l’arrière, les jambes ballantes, les yeux dans le vide et le rosaire à la main. Ou bien c’est une jeune maman avec un bébé dans les bras. On évite de croiser leur regard. En début de soirée, on investit la Neuville-Housset, un petit village à quinze kilomètres au sud-est de Guise...

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Bataille des frontières

7 Novembre 2023, 10:00am

Un peu d'histoire...

La bataille des frontières est le nom donné à la première phase de la la Première guerre mondiale. Il s'agit d'une guerre de mouvement, marquée par une série d'accrochages ou de batailles.

En 1914, le plan Schlieffen de l'armée allemande prévoit de contourner les armées françaises et anglaises par le nord puis par l'ouest pour dégager la route vers Paris. L'effort initial doit porter sur la Belgique, qui est pourtant un pays neutre. L'armée allemande est placée sous les ordres du maréchal Von Moltke (chef de l'État-major général de l'armée en campagne).
Le plan XVII de l'armée française, quant à lui,  est basé sur le principe de l'offensive à outrance. C'est la général Joffre qui est à la tête de l'armée française. Le corps expéditionnaire anglais ne lui est pas rattaché, il est sous les ordres du Field marshal John French. Les plans de l'État-major prévoient une offensive en haute Alsace et en Lorraine. Le déploiement de l'armée est prévu en conséquence. Dans ce cadre, la 5e armée (300 000 hommes), commandée par le général Lanrézac, a pour ordre de se déployer entre Hirson et Dun-sur-Meuse pour couvrir le flanc nord-ouest du dispositif français.
L'attaque allemande contre la Belgique et son offensive sur Liège conduit Joffre à ordonner à Lanrézac de pénétrer en Belgique. Le plan initial de Lanrézac vise à se positionner entre la Sambre et la Meuse pour attaquer en direction de Charleroi. C'est en application de ce plan que le 73e régiment prend position aux abords de Dinant.

La bataille de Charleroi, illustration d'époque

Les Français sont surpris par l'ampleur de l'offensive allemande. Les combats sont féroces. Très vite, la 5e armée est débordée sur son aile droite. Lanrézac ordonne de décrocher le 23 août. L'objectif est alors de se replier sur une ligne Amiens-Verdun. Aucune position n'étant préparée, le repli se transforme en déroute malgré une tentative de reprendre l'offensive autour de Guise (28-30 août).
La situation devient critique. Le 2 septembre, la Ière armée allemande est à 25 km de paris. Le gouvernement se retire à Bordeaux. La bataille de la Marne (septembre 1914) va permettre de stopper in extremis l'offensive allemande. La guerre va rentrer dans une nouvelle phase, celle de la guerre des tranchées.

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Hirson, 5 août 1914

6 Novembre 2023, 10:00am

Hirson, une petite ville et une petite gare pour rassembler un corps d’armée. Mercredi 5 août 1914. Le train déverse sur le quai une marée de képis et de capotes bleu qui s’écoule lentement par la porte du bâtiment. À l’extrémité du quai, un peu plus loin, on débarque les voitures transportant vivres et bagages, les caissons à munitions, les cuisines roulantes et les voitures médicales. Les conducteurs guident les chevaux et les mulets qui descendent la rampe d’un pas hésitant. On piétine dans la salle des pas perdus, Pierre, Gaston, un jeune prof d’histoire géo qui n’a encore jamais enseigné, Michel l’apprenti boulanger, René l’agriculteur, tous quatre dans le même compartiment depuis Béthune, et tant d’autres, ça pousse derrière, ça n’avance pas devant. Sur la place, on respire. Quelques drapeaux aux fenêtres en face de la gare. Une banderole : Bienvenue au 1er corps d’armée. Des cocardes tricolores. Pendant un temps, c’est le désordre le plus complet, on se croise, on s’interpelle, des sous-officiers crient des ordres qu’on n’entend pas, Pierre a perdu de vue Gaston, non, il est là-bas, un grand échalas dont la tête dépasse de la masse des képis, et progressivement la nuée se fragmente, des regroupements se font, par compagnies, qui se rangent en colonne, en rang par trois, et se segmentent, quatre sections, sac sur le dos, fusil à l’épaule, et c’est parti.

Photographie d'époque

Au brouhaha de la place succède le martellement des brodequins sur les pavés, très vite les pas se sont accordés, il en résulte un bruit sourd et cadencé, celui que font toutes les troupes qui se déplacent, un bruit qui se répercute sur les façades des maisons en briques, d’abord trois puis deux étages, avec l’encadrement des fenêtres en pierre, et personne dans la rue hormis quelques gamins qui marchent un temps à leur côté, la main tendue contre la tempe, avant de repartir en courant ; et voilà qu’on est dans la campagne, on a passé la dernière maison, avec un potager, des citrouilles pas encore mûres. On est en Thiérache, avec son paysage de bocage, de haies sans talus, un pays d’élevage. Dans les prés, les bêtes pâturent sans même jeter un œil à la troupe qui passe. On a le soleil en face, on marche plein sud, le sous-lieutenant en tête et les deux sergents en serre-file. Personne n’a envie de parler, même pas René d’ordinaire si bavard...

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Régiment d'infanterie

3 Novembre 2023, 10:00am

Un peu d'histoire...

La composition théorique d’un régiment d’infanterie en 1914 en fait une unité de combat très mobile, taillée pour la guerre de mouvement. Plus de trois mille hommes, soixante voitures, cent cinquante chevaux… La guerre de tranchées va modifier cette composition, par attrition ou parce que les sous-officiers et hommes du rang affectés à des fonctions devenues sans objet seront réaffectés. Intéressons-nous cependant à cette composition théorique.

Régiment d'infanterie en mouvement, photo d'époque

Un régiment d’infanterie est commandé par un colonel ou un lieutenant-colonel. Il a pour adjoint un capitaine. Son état-major est composé de deux 2 médecins majors et d’un aide-médecin, d’un trésorier (un capitaine assisté d'un sous-lieutenant), d’un  officier du matériel (un capitaine assisté d'un sous-lieutenant) et d’un chef de musique.

Le régiment est constitué de trois bataillons et d’une compagnie hors rang (CHR). Chaque bataillon (environ mille hommes) est constitué de quatre compagnies et d'une section de mitrailleuses. Il est commandé par un commandant assisté par un lieutenant. Son état-major comporte un adjudant, trois ordonnances, un artificier et un sous-officier chargé de l'approvisionnement, deux médecins assistés de 3 ou 4 personnes (brancardiers, ambulanciers...).

Une compagnie comporte deux pelotons. Elle est commandée par un capitaine assisté d'un adjudant. Outre les deux pelotons, son effectif comprend un sergent fourrier aidé d’un caporal, un tailleur, un cordonnier, un cycliste, un infirmier assisté de quatre brancardiers et trois conducteurs.

Un peloton est commandé par un lieutenant (avec un clairon et un tambour). Il est composé de deux sections commandées chacune par un sous-lieutenant ou un adjudant. Une section comprend deux demi-sections, commandée chacune par un sergent, et qui comportent deux escouades de quinze fantassins commandées par une caporal.

La section de mitrailleuses est commandée par un lieutenant assisté d'un sergent. Elle est constituée de deux caporaux, un armurier, un télémètre, dix conducteurs et sept soldats.

La compagnie hors rang est composée de plusieurs groupes chargés de tâches spécifiques :

- approvisionnement et train régimentaire (transport de tout ce qui est nécessaire à la subsistance),

- détail et train de combat (transport de tout ce qui est nécessaire pour combattre),

- communication (téléphonie, télégraphie…),

- sapeurs-bombardiers,

- autres fonctions (éclaireurs, comptables, vétérinaires, maréchaux, bourreliers, tailleur, cordonnier, vaguemestre, cuisiniers, musiciens…).

Un officier d’approvisionnement, assisté d’un adjudant, d’un sergent-major, de deux sergents, de six bouchers, de conducteurs et de cyclistes, est chargé de l’approvisionnement et du transport des subsistances.

Un officier de détail, assisté d’un sergent-major artificier, de secrétaires et de conducteurs, est chargé de l’approvisionnement et du transport de tout ce qui est nécessaire au combat.

Les communications relèvent de l’officier chargé des liaisons. Liaisons téléphoniques (deux sergents, sept caporaux, trente-cinq hommes). Liaisons télégraphiques (un sergent, quatre caporaux, quinze hommes). Signalisation au moyen de pistolets de signalisation (un sergent, quatre caporaux, quatre signaleurs).

Passons aux équipements du train régimentaire commandé par l'officier d'approvisionnement. Il comporte deux sections de 5 fourgons commandées chacune par un sergent, une section de réserve de trois fourgons à disposition d'un sergent major, deux voitures à fourrage, deux voitures avoine, trois voitures à viande et des chevaux.

Le train de combat, commandé par l’officier de détail, est beaucoup plus fourni. À l’échelon du régiment, il comprend une quinzaine de voitures (outils, matériel médical, ambulance, eau, vivres, bagages), trois voiturettes affectées au transport du matériel télégraphique, deux forges et une cuisine. À l’échelon de chaque bataillon, on trouve quatre voitures (matériel médical, vivres, bagages, munitions) et deux caissons, tirés par quatre chevaux et transportant 22000 cartouches. À l’échelon de chaque compagnie, une voiture à munitions, une voiture pour les vivres et bagages et une cuisine roulante. Enfin, à l’échelon de la section mitrailleuses, des caissons à munitions, une voiture pour les vivres et bagages et une cuisine roulante.

Lorsque le régiment se déplace, le train des équipages s’étend sur près d’un kilomètre !

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